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Objet transitionnel et art-thérapie

Dans le cadre d'une thérapie pour aider un patient à dépasser un événement traumatique, l'art-thérapie permet de pouvoir symboliser dans la matérialité d'un tableau (par exemple) le non-subjectivé de sa pensée, c'est à dire ce que le patient n'a pas pu intégrer de son trauma, ce à quoi il n'a pas pu donner un sens car l'événement était trop violent, trop soudain, impensable dans l'instant en quelques sortes.

Le tableau proposé au patient et la création séances après séances permet de l'utiliser comme médiation, comme objet transitionnel.

Fonction d'espace intermédiaire du cadre thérapeutique

Le cadre thérapeutique proposé dans le cabinet permet l’existence d’un espace intermédiaire, d’une aire intermédiaire à l’intérieur de laquelle une relation thérapeutique va pouvoir s’établir.

            L’atelier d’expression artistique dans mon cabinet fait transition entre la réalité actuelle et le souvenir traumatique du patient, c’est un espace potentiel où il va pouvoir s’exprimer, créer et par conséquent retrouver son espace transitionnel personnel. Rappelons les origines du concept de transitionnalité développé par D.W.Winnicott en 1951. Il développe trois instances pour expliquer ce concept : l’objet transitionnel, le phénomène transitionnel et l’espace transitionnel[1].

 

Le tableau que crée le patient dans l'atelier, le principe même de création par l'art-thérapie devient objet transitionnel dans la mesure où il reçoit les projections des sentiments du patient par le biais de ce qu’il y représente. Il acquiert les qualités « relationnelles » particulières de l’objet transitionnel[2] :

La prise de possession de l’objet (du tableau), Le patient peut en faire ce qu’elle veut.
Le tableau peut être choyé, caressé aux doigts et aux pastels ou mutilé, lacéré si le patient décide de peindre aux couteaux.
L’objet ne doit jamais changer et il ne change pas dans sa forme même s’il se rempli au fur et à mesure des séances.
Il doit survivre à l’amour, la haine et l’agressivité.
L’objet a une consistance. Le tableau est une possession matérielle.
L’objet vient du dehors, c’est une réalité matérielle.
L’objet est voué à un désinvestissement progressif par perte de signification. Le tableau a vocation à être désinvesti, une fois qu’il aura joué son rôle de médium pouvant faciliter l’expression des traumatismes du patient.

 

[1] D.W. Winncott, 1971, Jeu et réalité, l’espace potentiel, Editions Gallimard, 1975, traduction française.

[2] Ibid. p. 34 (D’après les qualités énumérées par Winnicott).